jeudi 9 décembre 2010

La vie du foetus et plus....

Boris Brott est un chef d’orchestre du Hamilton Philarmonic Harmony en Ontario. Un jour, lors d’une entrevue à la radio, l’animateur lui demanda d’où il tenait son amour pour la musique. Après un moment d’hésitation, il lui dit candidement que la musique faisait partie de lui bien avant sa naissance. Puis il s’expliqua à son interlocuteur intrigué...
Un jour, il s’est aperçu qu’il pouvait parfois se passer de partition pour diriger certaines pièces de musique, même pour la première fois. Il dirigeait une œuvre, puis soudain la partie du violoncelle s’imposait à lui avant même d’avoir tourné la page. Il en parla à sa mère, elle-même violoncelliste. Lorsqu’il lui apprit de quels morceaux il était question, le mystère fut résolu : les pièces que Brott « connaissait » par cœur étaient celles que sa mère préparait pour un concert lorsqu’elle le portait.

(Cas rapporté par Thomas Verny)
 
Qui de nous se rappelle avoir eu 2 ans ? Qui se souvient des émois et des sensations de ses 18 mois, 9 mois, 2 semaines ? Pourtant, malgré le vide de nos souvenirs conscients, nous sommes tous capables d’admettre l’importance des premières expériences de vie du nouveau-né et de la première enfance.

Qu’en est-il de la vie intra-utérine ?

Depuis une trentaine d’années, l’accouchement est devenu, avec la sensibilisation de tous, parents, médecins, personnel hospitalier, une expérience enrichissante pour la mère et pour l’enfant, à travers un accueil moins traumatisant, empreint de chaleur et de douceur. Bien qu’il reste encore des pas à accomplir dans le sens du respect pour cet être vivant, ressentant et actif dans le processus de sa naissance, de ses premiers moments, de ses premières années, un progrès énorme a été réalisé dans l’étude du développement psychique du nourrisson et, maintenant, du fœtus. Il semble que, dans les vastes étendues de notre inconscient, soient aussi emmagasinés des souvenirs du corps maternel.

Souvenirs de la vie intra-utérine

Le système nerveux du fœtus, au dernier trimestre de la grossesse, est suffisamment développé pour recueillir des impressions sensorielles. Le bébé ressent. D’ailleurs, la vie est souvent possible même si la grossesse n’est pas menée à terme. Des psychiatres, des médecins et des psychologues se sont penchés sur l’interprétation de certains rêves adultes, sur des réflexions obtenues sous hypnose, sur certaines expériences bizarres, sur la corroboration des faits découverts ainsi par les parents, ou les notes au dossier médical. Ainsi, certains chercheurs affirment-ils que, tout au fond de notre inconscient, subsistent des souvenirs de la vie intra-utérine (voir encadré).

Certes, il s’agit d’un domaine de la recherche très délicat. Certaines données relèvent de l’intuition, d’autres sont le fruit de recherches scientifiques rigoureuses. Ce qui est intéressant toutefois, c’est l’ouverture d’esprit de ces hommes de science qui osent maintenant parler de ces choses indémontrables que sont l’amour, la relation à l’enfant, l’acceptation de cet enfant, les liens de communication qui peuvent exister entre la mère, le père et le bébé à naître.

La naissance marque une étape très importante et décisive dans la vie de l’enfant. Mais bien avant ce moment, la vie individuelle a débuté. Le fœtus acquiert, avec les semaines de la grossesse, de plus en plus d’habiletés et même certaines habitudes très personnelles. Il se perfectionne sur tous les plans et son système nerveux se complexifie à un tel point que déjà, à la naissance, il possède un certain bagage de connaissances, d’expériences, dont certaines influenceront positivement son développement, et d’autres, au contraire, agiront négativement.

L’expérimentation active du fœtus

Les recherches, à ce jour, indiquent que le fœtus, dès le sixième mois de la grossesse, a une vie affective intense. En fait, toutes les structures nerveuses nécessaires pour éprouver certaines expériences sont présentes. Aussi dépourvu que semble un bébé à sa naissance, très tôt il commence, ou plutôt continue, à se développer. Ce qu’on ne pouvait pas soupçonner jusqu’à un passé récent, c’est que déjà, le jour de sa naissance, il avait appris et vécu beaucoup de choses.

Tous ses sens sont fonctionnels, il développe déjà des habitudes, il est actif dans le processus de sa croissance et aussi de sa naissance. Au moment de sa naissance, le bébé « reconnaît » la voix maternelle. Très tôt dans sa vie intra-utérine, l’ouïe se développe. Toute femme aura remarqué, dès qu’elle peut sentir les mouvements de son enfant, que ce dernier bouge ou sursaute lors de bruits violents.

Toute la grossesse est ponctuée des battements du cœur de sa mère, des autres bruits digestifs, accentués par le milieu liquide dans lequel il flotte. Une bande sonore de battements cardiaques dans une pouponnière a eu les résultats suivants : les enfants se nourrissaient, dormaient, respiraient mieux, pleuraient moins. Ce son avait été associé à la sécurité et avait sur eux un effet rassurant, qui avait persisté après la naissance.

Il en va de même pour les voix maternelle et paternelle, la musique, les chansons qu’on fait entendre au fœtus avant qu’il naisse, préparant déjà la relation qu’on aura avec lui, et nous donnant des moyens de lui donner de la sécurité.

C’est aussi le cas pour le goût et l’odorat. Quand on injecte des saveurs sucrées ou amères dans le liquide amniotique, l’échographie nous permet de constater que le fœtus est capable d’exprimer par sa mimique s’il apprécie ou non. À la naissance, il est également capable de reconnaître certaines odeurs (sensibilité accrue en présence du liquide amniotique, du lait maternel, ou de la peau de sa mère).

On a remarqué que le bébé, dans l’utérus, est sensible à la position verticale ou horizontale de sa mère. Il a tendance à adopter son rythme. Ainsi, l’enfant d’une mère très matinale aura tendance, après sa naissance, à s’éveiller tôt le matin et inversement si sa mère avait l’habitude de faire la grasse matinée lorsqu’elle le portait.

Au moment de la naissance enfin, l’enfant s’aide et ajoute ses efforts au travail des contractions. L’accouchement d’un bébé mort-né est en effet beaucoup plus long et plus difficile que celui d’un enfant bien vivant.

Le développement psychique du fœtus

C’est par nos sens que nous captons les informations de notre environnement, par nos cellules nerveuses que nous les interprétons et finalement que nous réagissons.

Quand le système nerveux du fœtus se développe, il y a un décalage entre la maturation des cellules nerveuses motrices (permettant les mouvements volontaires) et celle des cellules nerveuses sensorielles (celles qui transmettent les informations au cerveau), ces dernières maturant beaucoup plus tôt. La myélinisation des cellules motrices, celles qui permettront de prendre, de parler, de marcher, termineront leur développement plusieurs mois après la naissance. Mais malgré son incompétence à s’exprimer, l’enfant peut recevoir et emmagasiner dans son cerveau les informations sensorielles qui lui parviennent.

C’est en analysant les rêves de nombreux adultes que les chercheurs en sont venus à remarquer certaines constances. Par exemple, beaucoup de claustrophobes (anxiété intense dans les endroits étroits) partagent l’expérience d’une naissance difficile avec problèmes respiratoires, utilisation de forceps, travail long et pénible. Ils rapportent souvent des rêves ayant pour thèmes la séquestration, la sensation d’étouffement et d’une libération difficile. Au contraire, les personnes agoraphobes (peur dans les grands espaces découverts, panique dans la foule et parfois désir de se retrouver en sécurité dans son lit, par exemple) ont souvent vécu une naissance prématurée alors que, ni physiquement ni psychologiquement, ils n’étaient prêts. Le monde apparaît alors comme trop grand et menaçant. On peut souvent interpréter leurs symptômes et leurs rêves comme un désir de retour au sein maternel.

Même une naissance normale peut laisser des marques, et de plus en plus, on croit que les expériences désagréables de la grossesse (chute, maladie, dépression ou anxiété marquée) peuvent laisser derrière elles des sensations importantes, dont l’inconscient garde la mémoire, et qui réapparaissent symboliquement dans les rêves.

Les émotions du fœtus

Un nouveau-né et généralement tous les enfants sont sensibles aux états d’âme de leurs parents. Par exemple, on remarque qu’un bébé au sein boit mal et manifeste son inconfort par une mauvaise digestion, si sa mère est nerveuse, stressée, quand elle allaite. De la même façon, les enfants ressentent la tension dans la maison, ou l’énervement des parents, et cela transparaît dans leur comportement par de l’agitation ou autrement. Pourquoi en serait-il autrement pour le fœtus, si intimement « lié » à sa mère ?

Des recherches très sérieuses ont démontré que l’anxiété se traduit par une décharge importante de catécholamines dans le sang. Ces substances ne sont pas arrêtées par le placenta et vont directement dans la circulation du fœtus, provoquant chez lui les mêmes symptômes que chez la mère : accélération du rythme cardiaque, agitation. Si la situation perdure, on est à même de penser que des conséquences à long terme seront possibles même après la naissance. Le fœtus est directement branché sur les émotions de sa mère parce que premièrement, les émotions ont un substrat chimique, hormonal qui passe dans le sang, et deuxièmement, il ressent, comme le nourrisson, par sensibilité, les états d’âme de sa mère. L’alcool, la nicotine, les médicaments ont le même effet, puisque le placenta ne les arrête pas. Par exemple, la nicotine prive d’oxygène le fœtus qui éprouve alors une sensation d’étouffement, d’anxiété, sans pouvoir en identifier la cause.

De plus en plus, on croit aussi qu’il est possible que notre personnalité influence l’enfant qu’il sera puisqu’il subit, sans les comprendre, nos attitudes et sentiments à son égard.

Désirer ou non un enfant

Quand une grossesse est non désirée, consciemment ou non, est-il possible que l’enfant puisse le ressentir ? Dans La vie secrète de l’enfant avant sa naissance, Thomas Verny et John Kelly rapportent une recherche portant sur 141 femmes réalisée par Gerhard Rottmann qui permet de constater le bien-fondé de cette hypothèse voulant que le fœtus soit capable de distinctions émotives. Il a divisé les femmes en 4 groupes :
  1. Les « mères idéales ». Ces femmes manifestaient un désir conscient et inconscient (mesurable par un test) de leur enfant. Elles ont eu les grossesses les plus faciles. Les bébés, quant à eux, n’ont présenté aucun problème, ni physique, ni psychologique. Ils étaient en santé.
  2. Les mères présentant une double attitude négative (refus conscient et inconscient de l’enfant, mesuré par le test de Rottmann) ont vécu de graves problèmes de santé pendant la grossesse. Il y a eu plusieurs prématurés, des enfants de faible poids et très tôt, présence de problèmes affectifs.
  3. Les mères ambivalentes (heureuses consciemment de leur grossesse, mais hésitantes au test) quant à elles ont donné naissance à des enfants qui ont perçu, semble-t-il, l’hésitation. C’est dans ce groupe qu’on a détecté le plus de problèmes gastro-intestinaux et de problèmes de comportement.
  4. Le quatrième groupe, que Rottmann a appelé « mères indifférentes » (non-désir d’enfant conscient, mais test indiquant le contraire), a mis au monde en majorité des bébés léthargiques, passifs, apathiques.
Une autre observation du docteur Verny laisse supposer qu’un bébé peut refuser le sein maternel s’il a ressenti un rejet de sa mère pendant sa vie intra-utérine.

Certes, ces nouvelles avenues sont passionnantes. Elles doivent encourager les futures mamans à être vigilantes et aimantes dès les premiers instants de la vie, car qui sait ? Il ne faut pas cependant que la responsabilité qui leur échoit les écrase. L’enfant a probablement aussi beaucoup de ressources positives. Il faut lui faire confiance. Nous parlons ici de cas extrêmes.

Dans les faits, plusieurs grossesses, non désirées au départ, se transforment dans un désir sincère de l’enfant. Neuf mois de préparation transforment non seulement le corps, mais aussi l’esprit. Il arrive aussi fréquemment que de graves problèmes psychologiques s’estompent d’eux-mêmes pendant la grossesse. La nature est forte et apporte son concours. Mais la conscience, éveillée par ces nouvelles avenues scientifiques, rend encore plus palpitant le miracle de la vie.

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